Pépinière : se regrouper pour reconquérir la clientèle de proximité
En Ile-de-France, les pépiniéristes ont créé un groupement d'intérêt économique (GIE) « Pépinières Franciliennes » pour proposer une offre plus complète à la clientèle du monde du paysage recherchant des lots importants et diversifiés plus faciles à trouver hors de nos frontières...
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« L'hiver dernier, nous avons rassemblé, pendant une demi-journée, quatre acheteurs de végétaux de la région parisienne représentant le groupement d'entreprises du paysage ISS, le conseil général des Hauts-de-Seine, le cabinet de conception Terrabilis et la Ferme de Gally. L'objectif de cette séance était de capter leurs attentes en ce qui concerne les produits de pépinière, tant en termes de qualité que de quantité, de prix et de services. Nous en avons retenu que chacun “dans notre coin” nous sommes trop petits pour servir correctement la demande formulée. Pour peser sur le marché du paysage, notre seule chance est donc de nous regrouper », explique Laurent Chatelain qui dirige désormais la pépinière familiale à deux pas de l'aéroport de Roissy.
Les chiffres lui donnent raison : la pépinière régionale ne représente que 3 tout petits % des achats de produits de pépinière des entreprises du paysage et collectivités de la région. Certains faits confortent également le pépiniériste. Par exemple, le déroutant constat dressé auprès de la responsable des achats « végétaux » d'une importante agence de paysagistes qui explique ne connaître « que sept pépinières, dont deux en France ». Autre réalité : beaucoup de concepteurs travaillent directement sur un catalogue d'une pépinière étrangère particulièrement complet et bien fait...
Selon Bruno Picard et Fabrice Martin, pépiniéristes en Seine-et-Marne, il ne fait aucun doute qu'en Ile-de-France « l'avenir de la pépinière passe par une démarche de regroupement en allant bien au-delà des habitudes de collaboration déjà existantes ».
Au-delà des simples échanges entre collègues
Car ces habitudes existent. Comme le rappelle son président, Bruno Picard, la région a déjà créé une structure de regroupement, le Conseil Horticole d'Ile-de-France. Elle rassemble les producteurs de la région, est rattachée aux chambres d'agriculture d'Ile-de-France, dispose d'un conseiller et travaille essentiellement sur le plan technique, organisationnel, économique, social et syndical. « Le Conseil Horticole d'Ile-de-France a travaillé sur la dynamisation de l'offre, organise des visites commerciales d'échanges entre pépiniéristes. L'ensemble de ces actions a ouvert une formidable opportunité, pour ceux qui le souhaitaient, de s'engager avec des collègues dans une démarche stratégique collective et une nouvelle façon d'aborder certains marchés », poursuit Jean-Robert Euvé, pépiniériste à Feucherolles, dans les Yvelines.
Laurent Gravier, pépiniériste dans l'Essone, anime pour sa part une réunion hebdomadaire d'achat et de vente de végétaux entre pépiniéristes de la région qui de son avis « reste un instrument de régulation de l'offre de chaque professionnel participant pour répondre à la demande de sa clientèle. Ce dispositif a ses propres limites et ne peut fonctionner sur une organisation plus ambitieuse, du simple fait que chaque professionnel applique sa marge commerciale. Aussi, pour éviter le mécanisme en cascade et les augmentations de prix induites, il devenait impératif de créer une structure collective avec ses moyens propres pour aborder des marchés plus ambitieux (collectivités, paysage...) ».
Choisir les appels d'offres les plus valorisants
C'est de l'ensemble de ces réflexions qu'est née chez sept dirigeants de pépinières de la région l'idée de créer le GIE « Pépinières Franciliennes ». « Dans le Conseil horticole, nos parents en parlaient déjà, explique Bruno Picard. Ils se disaient “peut-être, il y aura des besoins...”. L'idée a mûri, le marché a évolué, tout le monde se regroupe aujourd'hui. C'est la seule solution pour proposer une offre globale et importante. C'est indispensable car les clients recherchent des choses de plus en plus variées. » La structure ne se contente pas de répondre à des appels d'offres locaux. Elle a aussi récupéré des marchés sur la grande région et vise l'international. L'objectif n'est pas d'honorer tous les appels d'offres mais ceux qui permettent de valoriser la qualité sans trop tirer sur les prix : « Nous répondons si les critères techniques pèsent pour au moins 40 % dans l'attribution du marché » indique Olivier Garcin, des pépinières Allavoine, à Bièvres, dans l'Essonne.
Le GIE a été construit sur le principe d'équitabilité. Lorsqu'un article n'est produit que par un adhérent, la priorité est logiquement donnée à cette entreprise. Mais si plusieurs producteurs le proposent, priorité est donnée à celui qui a le moins vendu au sein du GIE. « Le but est de rechercher une équité en termes de chiffre d'affaires, précise Laurent Chatelain, président du GIE. Et si personne n'a cet article, nous achetons en priorité en France. C'est le cas pour les plantes grimpantes, par exemple, que nous faisons venir des pépinières Travers ou Javoy, et des plantes de terre de bruyère qui proviennent des établissements Roué ou Kerisnel. »
La notion de proximité n'est pas neutre dans la démarche : « Il n'y a pas si longtemps, cette notion était une idée d'écolo. Aujourd'hui, de plus en plus de gens se rendent compte que la proximité ce sont des emplois pour chacun d'entre nous », explique Laurent Chatelain.
Embaucher un salarié et se faire connaître
Pour l'instant, la structure existe sans aucun salarié. L'objectif est le recours à une personne au moins, qui devrait être embauchée à un horizon de quelques mois, ne serait-ce que pour réaliser les appels d'offres, qui sont dans l'immédiat partagés au sein des entreprises impliquées. Dans le même temps, une démarche stratégique de lobbying est engagée afin de se faire connaître, en particulier auprès des concepteurs, et de trouver de nouveaux clients. En attendant, la structure répond à des appels d'offres et travaille parfois avec des clients que les entreprises cèdent au GIE « avant de risquer de les perdre parce que l'on est devenu trop petit », poursuit Laurent Chatelain. À la question « Les adhérents pourraient-ils aller jusqu'à raisonner en commun leurs mises en production ? », le pépiniériste répond sans détour que « ce point a fait partie des discussions de base de la fondation du GIE et que des visites régulières des sites de production sont déjà organisées au sein même du groupement ». Enfin, il convient de noter que chaque producteur impliqué est engagé dans la démarche « Plante Bleue » et a déjà à la fois réalisé son autodiagnostic et suivi la formation.
Pour Stéphane Thiney, pépiniériste à Gometz-la-Ville, dans l'Essonne, « le but de cette démarche est d'être certifié au mois de juin prochain et ainsi d'affirmer plus encore une cohésion du groupe qui, par ce label, donnera des gages supplémentaires de cohérence verticale de toutes les entreprises impliquées ». D'ici là, une saison entière sera passée et le GIE aura peut-être suscité d'autres vocations...
Pascal Fayolle
Hors-sol. Les clients du GIE « Pépinières Franciliennes » pourront bénéficier des productions de 14 hectares de conteneur, soit autour de 350 000 unités produites.
Pleine terre. Les sept adhérents du GIE proposent 252 hectares de pépinière de pleine terre avec des spécialités aussi diverses que les conifères, les arbres, les arbustes...
Offre rassemblée. L'objectif du GIE est de proposer un seul interlocuteur commercial à des clients recherchant de grosses quantités sur un marché de proximité.
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